Un chameau, c'est un cheval dessiné par une commission d'experts. (Francis Blanche)

Le rapport du "groupe de réflexion" du CNRA.

Rappel  
Au matin du 9 février 2010, le chantier archéologique de Noyon (Oise) est retrouvé parsemé de trous de pillage. Cette occasion de diaboliser un peu plus les utilisateurs de détecteurs de métaux étant trop belle, le ministre de la Culture, dès le 15 février, alors que l'enquête vient à peine de débuter, demande au Conseil National de la Recherche Archéologique de constituer un groupe de réflexion "Contre le pillage de sites archéologiques à l’aide de détecteurs de métaux".....
Ce groupe de réflexion (auquel aucun représentant des associations de détection ne fut convié) a présenté son rapport en séance plénière du 2 décembre 2010.

Un "copié/collé"  
La première chose qui saute aux yeux des détecteuristes à la lecture de ce rapport c'est que les membres de ce groupe de réflexion n'ont fait preuve d'aucune originalité et se sont contentés de reprendre, apparemment sans les vérifier, les allégations trop souvent mensongères de l'association anti-UDM, et de démolir de façon systématique tous les arguments de bon sens des UDM, là encore dans la plus pure lignée des attaques des anti-UDM !
La preuve la plus flagrante de ce manque de recherche, c'est que pour "estimer" le nombre d'objets pillés, (soi-disant 10 millions depuis 1991), ils citent sans complexe un "compteur" automatique que l'association anti-UDM a copié sur le site anglais de Paul Barford, et qui se contente d'augmenter systématiquement, comme un métronome, de 107 à chaque heure du jour, et de 12 les heures de nuit. Et après cela, on ose nous accuser de manquer de "méthodologie scientifique" !
Y-a-t-il eu seulement des études sérieuses ?
On peut en douter à la lecture des nombreux chapitres de ce rapport ! Il n'est que de citer le passage suivant concernant le modèle Anglais : "Dans ce pays, les grands pillages ont considérablement augmenté ces dernières années et le patrimoine enfoui a été gravement détérioré..."
Or, justement, une étude sur le pillage archéologique, réalisée en janvier 2009 au Royaume-Uni par "l'Oxford Archaeology" à la demande de "l'English Heritage", rapporte lui une "diminution significative" (significant decrease) des pillages de sites, depuis l'instauration de ce système. On peut même lire dans un résumé de cette étude "The introduction of the Treasure Act (1996) and Code of Practice of Responsible Metal Detecting in England and Wales (2006), and the role of organisations such as the NCMD have also been cited as helping stop this criminal damage (L'introduction du Treasure Act et du Code de Conduite de Détection Responsable en Angleterre et en Ecosse (2006) et le rôle d'organisations comme le NCMD ont également été cités comme aidant à stopper ces dommages criminels (pillages)).
Cette étude est très sérieuse. Elle a nécessité 2 années d'enquête, et a eu le mérite d'écouter les autorités, les archéologues et les association de détection. Le rapport fait 212 pages, mais le groupe de réflexion du CNRA n'a pas du le lire, et a sans doute trouvé plus facile de copier/coller les contre-vérités de l'association anti-UDM !
On notera d'ailleurs, que le "compteur d'objets pillés" (erosion counter) anglais n'augmente, lui, que de 60 par heures le jour et de 6 la nuit, soit environ 2 fois moins que sa copie française ! Une autre preuve de l'efficacité du système anglais ?

La "détection de loisir" n'existerait pas ?  
Toujours au fil des pages de ce rapport on peut lire que "la détection de loisir n'existe pas" et que ce sont "les utilisateurs de détecteurs de métaux sans autorisation" qui "ont inventé l’expression". Sans doute pour faire écho aux réponses polycopiées que le Ministère a cru devoir faire aux députés, et qui stipulent que la "détection de loisir" n'a "aucune consistance juridique" !
C'est nouveau ça ! Les loisirs ont maintenant besoin d'une "consistance juridique" ! Est-ce à dire que la lecture est réservée aux seuls professionnels car il n'y a pas, juridiquement parlant, de "lecture de loisir" ? Et où trouve-t-on la définition "juridique" de la "promenade de loisir", de la "baignade de loisir", des "mots-croisés de loisir", du "jardinage de loisir", etc. ?
Et si la "détection de loisir" n'existe pas, pourquoi tant d'énergie dépensée à vouloir l'éradiquer ?

"Toute la France...."  
Autre argument utilisés dans ce rapport : "Il paraît nécessaire de mettre en avant l’idée que la France entière est un « réservoir de données archéologiques » et que la détection d’éléments de ce patrimoine est interdite « en tout point du territoire national »". Pas moins ! Juste histoire de dénaturer l'article L.542-1 du Code du Patrimoine !
Trop facile !!!
Pourquoi alors ne pas déclarer que "toute la France est un espace public", pour interdire les fumeurs ? Ou "Toute la France est en zone inondable" pour éviter les constructions gênantes ! Et en argumentant que "toutes les espèces végétales sont protégées", on pourra interdire la tonte des pelouses. Mais comme la "tonte de gazon de loisir" n'a pas de consistance juridique (voir ci-dessus), il est possible que l'on soit déjà hors-la-loi sans le savoir !
Et si vraiment toute la France est un site archéologiques en puissance, pourquoi voit-on journellement autour de nous, des engins de chantiers tracer de nouvelles routes (plus de 300 km par an), creuser les fondations de nouvelles maisons (150.000 par an), ou creuser de nouvelles piscines (plus de 50.000 par an), sans que l'on n'y voit jamais passer aucun archéologue ?
L’agriculture perd 86 000 hectares par an, au profit de l’urbanisation, soit un département tous les sept ans ! Osera-t-on prétendre que les archéologues français sont assez nombreux pour étudier sérieusement la "stratigraphie" et les "liaisons spatiales" de 236 hectares de labours chaque jour ?

Un métier sous haute surveillance  
Le métier d'archéologue risque, si l'on en croit ce rapport, de devenir un métier sous haute surveillance, ce qui risque de détruire bien des vocations !
Une "charte de déontologie" y est proposée qui devra comprendre un article concernant les détecteurs de métaux. Selon cette charte, l'archéologue s'engagerait "à ne pas utiliser de détecteur sans autorisation", ce qui est déjà le cas, mais également "à ne pas collaborer avec des personnes non autorisées par l'État". Comme si on demandait à la police de n'utiliser que des "indics autorisés par l'état". Ils devront également "être vigilant sur les conséquences possibles de la communication", c'est à dire de ne pas parler de leurs travaux à des mécréants qui pouraient utiliser ces renseignements à des fins coupables. Enfin, ils devront veiller "à ne pas mentionner ni se référer, dans ses publications, à du mobilier d’origine douteuse, (« mobilier gris »), issu de découvertes illicites, afin de ne pas encourager le pillage".
Cette dernière remarque est intéressante. Le terme de "mobilier gris", désignerait, de fait, tout objet qui n'aurait pas été découvert par un archéologue ou par une personne assermentée. La confiance n'ayant plus droit de cité en archéologie, tout "mobilier" présenté par une personne autre que les sus-citées sera donc considéré comme "d'origine douteuse". Il faudrait donc, dans les publication archéologiques, ne plus tenir compte de tous les rapports faits à l'époque où l'archéologie officielle et respectable n'existait pas. Considérer comme douteuses toutes les découvertes faites par les membres des sociétés savantes, par des archéologues amateurs, ou effectuées par des particuliers qui auraient, à l'époque, voulu apporter leur pierre à l'édifice de la connaissance.
En voulant éviter tout "mobilier gris" c'est de beaucoup de "matière grise" dont l'archéologie va se priver !
Les anti-UDM nous le répètent sans cesse : l'objet en lui même n'intéresse pas l'archéologie s'il est extrait de son contexte, entre autres la "stratigraphie" et les "liaisons spatiales". Donc s'il est découvert par des non-archéologues, dont, entre autres (et surtout) les Utilisateurs de Détecteurs de Métaux.
Alors, il faudra nous expliquer pourquoi le trésor de Pouilly-sur-Meuse, découvert par hasard en 2006 par un particulier creusant sa fosse septique ait pu être classé "trésor national" et acquis par le Musée Lorrain en 2009. Et pourquoi le ministre de la Culture, lui-même se réjouit dans un communiqué de "La rareté" et "L'intérêt historique" d'un tel ensemble !
Pourquoi ce trésor n'a-t'il pas été déclaré "mobilier gris" ? Un simple petit mot dans le communiqué du ministre l'explique sans doute : il a été découvert "fortuitement". Si son inventeur avait utilisé un détecteur de métaux, son "origine douteuse" aurait transformé cette "formidable découverte" en "pillage du patrimoine" comme pour le trésor du Staffordshire.
C'est l'archéologie par les archéologues, et pour les archéologues !! Les autres, circulez, y'a rien à voir ! (Mais n'oubliez pas de payer vos impôts, l'archéologie à besoin de vos sous..)

Des relents d'HADOPI ?  
Il y a un je-ne-sais-quoi dans cette chasse aux sorcières qui fait immanquablement penser à la loi HADOPI. Au départ une volonté de protéger un certain patrimoine intellectuel du pillage. On dit dans ce cas là "piratage". On cherche les coupables dans les plus inoffensifs, les jeunes qui "piquent" quelques musiques sur Internet. Puis le ministère de la Culture confie la réflexion à une entité extérieure qui établit un rapport indiquant où sont les coupables et les moyens de les combattre. Un projet de loi voit le jour, contesté par la CNIL et par de nombreux fournisseurs d'accès Internet. La loi définitive est promulguée mais reste à ce jour inapplicable.
D'ailleurs, monsieur Frédéric Miterrand, ministre de la Culture, qui semble partisan de la tolérance zéro en matière de détection de loisir, admet en commission des affaires culturelles qu’il a deux abonnements à Internet au cas où l’un des deux était un jour suspendu suite aux activités illégales de son fils !

Conclusion  
Finalement, la question n'est-elle pas : est-ce que cette commission a cherché à protéger le patrimoine tout en respectant les libertés individuelles des détecteuristes, ou s'est-elle simplement contentée, comme on le lui demandait, de cautionner et d'officialiser les mensonges de la sainte trinité anti-détecteuristes, le Ministère de la Culture, l'Inrap et l'association anti-UDM ?
Le fruit de cette réflexion semble avoir satisfait le ministre de la Culture, à entendre le discours qu'il a adressé au CNRA et aux CIRA en février : "J’ai tenu à vous réunir – et je sais qu’il s’agit là d’une première - pour vous témoigner toute ma reconnaissance et celle de l’ensemble de la communauté archéologique, mais aussi celle du Ministère de la Culture et de la Communication qui, je ne l’oublie pas, est aussi le ministère de la transmission et de la mémoire."
A la fin de ce discours, peut-être a-t-on entendu un tonitruant : "CHEF, OUI CHEF" ?

Références 
Le rapport du CNRA.
L'avis du CNRA.
Le rapport sur le pillage archéologique réalisé en Angleterre par l'Oxford Archaeolgy.
Le rapport résumé.
Le discours du Ministre aux CNRA et CIRA.
Le communiqué du ministère sur le trésor de Pouilly-sur-Meuse.
Le trésor de Pouilly.
Mention légale : 
Article L.542-1 du Code du patrimoine : « Nul ne peut utiliser du matériel permettant la détection d’objets métalliques, à l’effet de recherches de monuments et d’objets pouvant intéresser la préhistoire, l’histoire, l’art ou l’archéologie, sans avoir, au préalable, obtenu une autorisation administrative délivrée en fonction de la qualification du demandeur ainsi que de la nature et des modalités de la recherche. »